Avant de faire des films, Paus Paus était architecte. Fauna porte les stigmates de cette ancienne vie : un regard qui lit le paysage, repère les fractures qui séparent et délimitent les espaces, faisant du film une construction éloquente sur la séparation des mondes. D’un côté, il y a le territoire de la forêt, du berger et de son troupeau. Ici les chemins sont ceux que l’on arpente avec son corps, où l’on peut se perdre, se reposer, rêver. Le soleil sèche les herbes folles et le vent fait frissonner les feuilles. En face, il y a le territoire de la science, de la technique et du laboratoire. Là-bas, « il faut se séparer de la nature et la tenir à l’écart, la nature ne doit jamais entrer ». Monde hermétique, fait de portes qui se ferment, de couloirs qui ordonnent, de protocoles qui disciplinent les corps. Paus Faus joue avec les éléments, en une construction poétique non dénuée d’humour, avec des situations dignes d’une science-fiction. Et le berger de dire, parlant du temps où l’homme convoitait la lune : « c’était le temps des explorateurs, ils disaient que nous allions vivre sur d’autres planètes ». N’y sommes-nous pas déjà ?

Julia Pinget
Réalisatrice